Luberon Nature constate avec consternation que certains projets photovoltaïques sont en cours de construction dans des zones agricoles ou naturelles, ou l’objet de recours contre les permis de construire dans le Parc Naturel Régional du Luberon. Ce territoire, bien davantage que d’autres, se prête particulièrement mal à ce type d’installations : la taille des parcelles étant bien trop réduite, elles constituent de ce fait des atteintes graves à la nature et aux paysages et, de surcroît, une nouvelle « artificialisation » de terres agricoles particulièrement intolérable.
En outre ces projets doivent :
- Veiller à maintenir les espaces naturels et leur biodiversité.
- Préserver les paysages et le patrimoine bâti et notamment limiter le nombre de nouveaux poteaux électriques .
- Impliquer les citoyens et les associations de défense de l’environnement.
- Prévoir les réserves financières nécessaires pour le démantèlement de ces sites dont la durée de vie est limitée dans le temps.
- … etc.
Luberon Nature dit : au mitage des parcelles agricoles du Luberon.
Pour autant, le développement photovoltaïque est concevable, sous certaines réserves, sur des surfaces bâties, artificialisées ou anthropisées tout comme pour l’Agrovoltaïsme (installations permettant de coupler une production photovoltaïque secondaire à une production agricole principale : serres, hangars, bâtiments d’exploitation).
1. CONTEXTE REGIONAL ET TERRITORIAL
De manière générale, l’association « Luberon Nature » est attachée à une transition énergétique maîtrisée. Elle constate que le développement de projets industriels d’énergie solaire a commencé et tout porte à croire qu’il sera important sur le territoire du Parc Naturel Régional du Luberon à l’avenir.
Cette source d’énergie a en effet été retenue, parmi d’autres, pour la Région Sud (Provence Alpes Côte d’Azur – PACA) dans le Schéma Régional d’Aménagement, de Développement Durable et d’Egalité des Territoires – SRADETT de la région, adopté en juin 2019 avec un horizon à moyen et long terme (2030 – 2050) :
Extraits du STRADETT :
« La Région se donne pour objectif d’être neutre en carbone et de couvrir 100 % de sa consommation par les énergies renouvelables à l’horizon 2050 en jouant sur les économies d’énergie et l’accroissement des énergies renouvelables. »
« En faveur du solaire
- en privilégiant les projets visant l’autoconsommation d’énergies renouvelables notamment s’agissant des projets photovoltaïques sur toiture et sur ombrière ;
- en développant et installant des projets de parcs photovoltaïques prioritairement sur du foncier artificialisé : bâtiments délaissés, toitures et parkings, foncier aérodromes, friches reconnues stériles, serres agricoles, ainsi que sur des sites et sols pollués à réhabiliter ;
- en déployant des installations solaires thermiques et photovoltaïques dans des lieux très consommateurs d’énergie (hôpitaux, logements collectifs, piscines, etc.). »
Pour ce qui concerne le Parc Naturel Régional du Luberon, les objectifs chiffrés à l’horizon 2050 sont les suivants :
TOITURES DE PARTICULIERS | ||
Situation actuelle | Objectifs 2050 | |
M² | 167 000 m² | |
Nombre de foyers | 7 700 | 53 900 |
% des foyers du PNRL | 11% | 76% |
GRANDES TOITURES (Agricoles, industrielles, commerciales … etc.) | ||
Situation actuelle | Objectifs 2050 | |
M² | 2 318 000 m² | |
Nombre d’installations de 250 kWc | 1 325 | 7 950 |
Nombre moyen d’installations par commune du Parc | 17 | 100 |
CENTRALES AU SOL | ||
Situation actuelle | Objectifs 2050 | |
Hectares | 167 | 835 |
Nombre de centrales de 10 hectares | 17 | 83 |
Nombre moyen de centrales par commune | 0,25 | 1 |
Extrait de la « Note de cadrage photovoltaïque en Vaucluse » de la Préfecture :
Les priorités d’implantation
Le développement de l’énergie photovoltaïque représente un enjeu certain dans la production d’énergie renouvelable en particulier en région Provence-Alpes-Côte d’Azur. Cependant les projets de production d’énergie électrique au moyen de centrales au sol et les projets de production par serres photovoltaïques peuvent entrer en conflit avec d’autres enjeux du développement durable tels que :
- Le maintien de l’activité agricole et de surfaces agricoles de qualité,
- Le maintien des espaces naturels et de leur biodiversité,
- La préservation des paysages,
- La prévention des risques.
Afin de limiter la consommation d’espace et l’artificialisation des sols, le développement de la production d’énergie photovoltaïque doit se faire prioritairement sur surfaces bâties, artificialisés ou anthropisées.
2. ANALYSE ET EXEMPLE
On constate ainsi que le STRADETT de la Région SUD et la lettre de cadrage de la Préfecture excluent d’emblée les projets de sites industriels photovoltaïques sur des terres agricoles les réservant à des sites et emplois limités.
Luberon Nature souscrit aux projets raisonnés de transition écologique, dans le respect de la ruralité et des paysages du Luberon. Aussi nous partageons les approches de la Région PACA et de la Préfecture du Vaucluse en matière d’énergie solaire rappelées ci-dessus.
C’est dans ce contexte que nous sommes particulièrement inquiets de constater la récente apparition de projets, certes de taille limitée, dans la vallée du Luberon.
L’un d’entre eux se situe à cheval sur les communes de Roussillon et de Saint Saturnin-les-Apt. D’une superficie, pour commencer (!), de l’ordre de 3 ha, les panneaux solaires seraient installés sur une ancienne carrière, actuellement utilisée en terre agricole ! Ce site industriel serait particulièrement visible du haut de Roussillon, commune très fréquentée par les touristes.
Les permis de construire (Roussillon et Saint Saturnin les Apt) ont fait l’objet d’un recours qui en est à ce jour au niveau de la cour de cassation.
Luberon Nature entend s’opposer à ce projet pour les raisons suivantes :
- Il n’est pas en conformité par rapport aux directives, objectifs et recommandations tant de la Région que de la Préfecture
- Un tel projet constituerait un précédent qui pourrait entrainer le mitage de la vallée
- La justification de ce projet est exclusivement l’effet d’aubaine en raison du fait que le photovoltaïque est, encore à ce jour, outrageusement subventionné
- La production d’électricité sur une telle parcelle serait faible. Le gestionnaire de réseau n’aura de cesse que d’en accroitre la puissance en augmentant sa superficie ou encore en multipliant le développement de projets similaires à proximité.
- Chaque site photovoltaïque nécessite l’installation de nombreux poteaux et fils électriques pour acheminer le courant jusqu’au poste ENR le plus proche !
- Comme, malheureusement, fort souvent dans les installations d’énergie renouvelables, tout porte à croire que les réserves financières pour le démantèlement du site, dont la durée de vie est limitée, ne sont ni prévues, ni prises en compte.
Ce projet nous parait constituer le parfait exemple de ce qu’il faut absolument interdire dans le Luberon
3. LES RÈGLES DE DÉVELOPPEMENT DU PHOTOVOLTAÏQUE QUE LUBERON NATURE ENTEND FAIRE RESPECTER
A. Chaque projet photovoltaïque doit :
- Strictement respecter la lettre de cadrage du préfet du Vaucluse : afin de limiter la consommation d’espace et l’artificialisation des sols, le développement photovoltaïque doit se faire en priorité sur surfaces bâties, artificialisés ou anthropisées
- Veiller à maintenir les espaces naturels et leur biodiversité.
- Préserver les paysages et le patrimoine bâti.
- Impliquer les citoyens et les associations de défense de l’environnement.
- Prévoir les réserves financières nécessaires pour le démantèlement de ces sites dont la durée de vie est limitée dans le temps.
Doivent être écartés systématiquement de tout projet photovoltaïque :
- Les espaces naturels sensibles, les zones faisant l’objet d’arrêté de protection de biotope,
- Les espaces boisés classés et les réserves naturelles.
Les projets doivent systématiquement comprendre une réelle étude d’impact paysager :
Intégrant un état initial du paysage, la description du projet et de ses impacts sur le paysage et une description des mesures de réduction d’impact, d’accompagnement, d’intégration et de compensation paysagères.
B. Pour le solaire photovoltaïque en toiture
Luberon Nature est favorable aux installations de petite dimension (quelques dizaines de m²), l’autoconsommation devant être privilégiée.
Pour les installations de grande dimension : (quelques centaines à plusieurs milliers de m²) :
Luberon Nature préconise de limiter ces installations aux zones urbaines, artisanales ou industrielles existantes et d’éviter le secteur urbain protégé.
Luberon Nature n’est pas favorable aux installations de grande dimension dans les zones de campagne et de biodiversité ou à proximité du bâti patrimonial ou des villages historiques.
C. Pour les centrales photovoltaïques au sol
Les centrales solaires au sol présentent l’inconvénient majeur d’être de grandes consommatrices d’espace et de contribuer à l’artificialisation des sols.
Leur implantation doit être privilégiée :
- Sur les zones artificialisées, dégradées ou polluées, les friches industrielles ou militaires.
- Sur les anciennes carrières n’ayant pas fait l’objet d’un réaménagement à vocation naturelle ou agricole, sur les décharges réhabilitées ;
- Dans les zones industrielles ou artisanales, parkings, délaissés routiers…
Leur implantation doit être exclue :
- Dans les sites Natura 2000 et les sites de protection de biotope. Dans les zones à forte valeur culturelle et paysagère.
- Dans les forêts et plus particulièrement dans les zones à fort degré de naturalité (degré défini par le PNRL).
- Dans les zones humides et prairies sensibles et dans les réserves biologiques définies par le code forestier.
- Dans La Zone de Nature et de Silence définie par la charte du PNRL ou dans les périmètres des inventaires nationaux (ZNIEFF).
- Dans les espaces identifiés à forte valeur de biodiversité : secteurs de valeur biologique majeure et milieux exceptionnels (secteurs définis par le PNRL).
- Dans la zone centrale de la Réserve de Biosphère Luberon-Lure et les sites de la Réserve Nationale Géologique du Luberon.
- Dans les zones agricoles cultivées, dans les zones potentiellement cultivables et les zones pastorales.
- Dans les cas de co-visibilité avec un monument historique ou sur les sites inscrits ou classés.
- Dans les points de vue panoramiques majeurs, points visuels majeurs ou couloirs de vue remarquables.
Les projets de centrales au sol devront :
- Intégrer les impacts de l’ensemble des aménagements liés au projet photovoltaïque : parc photovoltaïque, abords, voies d’accès, raccordement au poste source, édifices connexes, obligations légales de débroussaillage etc.
- Aboutir dans l’étude des impacts agricoles et pastoraux, environnementaux, sociaux et paysagers à une démarche de minimisation des impacts du projet sur l’ensemble de ces domaines.
- Rechercher une cohérence spatiale en conciliant optimisation foncière et intégration des panneaux à la géométrie du site, afin d’éviter « l’effet pavé ». Il conviendra de tenir compte, de l’implantation dans la pente des futures installations en vue d’éviter les terrassements et suivre les courbes de niveaux du sol.
- Contribuer à ne pas accentuer les phénomènes d’érosion des sols en prévoyant la plantation d’un couvert végétal drainant et en proposant un traitement végétal adéquat. Les espèces végétales choisies devront être locales et adaptées au climat méditerranéen.
- Proposer des aménagements connexes permettant la bonne intégration paysagère du projet : mise en place de clôtures végétales et perméables à la faune dans les zones de co-visibilités.
- Prendre en compte les secteurs de sensibilité paysagère définis dans la Charte du Parc du Luberon et son Plan de Parc (cônes de vue, seuil de vue, points d’appels visuels majeurs, affleurements rocheux etc.) et mener, dans le cadre des études d’impact, l’ensemble des études complémentaires montrant l’intégration paysagère optimale du projet au secteur choisi.
- Comprendre une étude de composition argumentée avec le site, une analyse des aires de co-visibilités avec des points de vue pertinents rapprochés et lointains, notamment en dehors de toute limite administrative, une étude de composition minimaliste intégrant l’ensemble des équipements annexes (clôtures, aires de débroussaillage, accès et voiries, réseaux…).
D. Préconisations pour la gestion et le démantèlement des centrales photovoltaïques :
Luberon Nature recommande d’appliquer strictement ce qui est défini dans les documents de cadrage du département et dans le document de doctrine du PNRL.
E. Pour l’agrivoltaisme
L’agrivoltaisme concerne les installations qui permettent de coupler une production photovoltaïque secondaire à une production agricole principale : serres, ombrières, hangars, bâtiments d’exploitation.
Le caractère agricole du projet doit dans tous les cas être démontré.
Le document de cadrage de la préfecture, les recommandations de la DREAL et la charte du PNRL doivent être strictement respectées et ce sans dérogation.
Les projets d’agrivoltaisme devront :
Respecter les zones à statut de protection et des périmètres à enjeux écologiques du Parc : zonez de Nature et de Silence, secteurs de valeur biologique majeure, milieux exceptionnels.
Démontrer l’absence ou faiblesse des impacts en termes d’effets d’emprise, de coupure, de fragmentation des milieux naturels, des continuités écologiques et de perturbation ou de destruction d’espèces.
Minimiser leur impact paysager et les perceptions visuelles depuis les habitations riveraines, routes, et points de vue accessibles au public et ce de près et de loin ou encore démontrer une intégration architecturale et paysagère à son environnement immédiat et lointain.
Prendre en compte l’absence des effets cumulés sur l’environnement avec d’autres installations d’exploitation, regrouper les constructions pour éviter le mitage.
Privilégier de rapprocher au plus près les installations autour des bâtiments d’exploitation existants et ainsi limiter au maximum le mitage de l’espace agricole.
Implanter le bâtiment dans le respect de la topographique intégrer les constructions dans la pente et privilégier une hauteur maximale adaptée aux bâtiments environnants.
Obtenir et respecter systématiquement les avis des architectes conseil du Parc ou du CAUE (le Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement) pour une intégration optimale de ces nouvelles constructions à l’environnement.
Mettre en œuvre une intégration optimale à l’environnement : préservation de la végétation existante, plantations à prévoir, soigner les vues depuis les points rapprochés et les points hauts.
Respecter les documents d’urbanisme, le PLU.
Prévoir la remise en état du site après exploitation : démantèlement et recyclage.
F. Pour d’autres cas
Luberon Nature s’intéresse aux projets innovants du point de vue environnemental, développement des énergies renouvelables et citoyenneté.
Un exemple est l’association des Centrales Villageoises qui sont des sociétés locales à gouvernance citoyenne qui portent des projets en faveur de la transition énergétique en s’inscrivant dans une logique de territoire. Elles associent citoyens, collectivités et entreprises locales et contribuent aux objectifs énergétiques en tenant compte d’enjeux territoriaux transverses (développement économique local et intégration paysagère…). Les Centrales Villageoises fonctionnent en réseau au sein d’une Association et partagent un modèle commun. Ce modèle est aujourd’hui mis en œuvre dans plusieurs régions françaises.
Méthodologie d’analyse des projets :
Pour chaque projet photovoltaïque une analyse matricielle de cotation du respect des différents critères permettrait d’objectiver la situation. Une pondération serait utile pour tenir compte du poids relatif des paramètres, certains seront sans doute rédhibitoires ou considérés comme impératifs : matrice à créer ? Pondération des critères à définir ?
Merci de ces informations et de votre travail.
Quel est votre avis, et la mairie de Cabrières vous a t elle sollicité, sur le projet de construction de panneaux photovoltaiques sur 3,7 hectares sur le site du Grand Jas et sur le toit de l’école et du gymnase. Ayant assisté hier soir à une réunion dite de concertation, en fait d’information sur un projet qui semble déjà avancé.
je n ‘ai pas entendu qu’il y avait eu une étude d’impact paysager, ni sanitaire.
Merci d’avance. Bien cordialement