- A Buoux, au Château de l’Environnement, l’inquiétante dérive des comptes de gestion du Parc Naturel Régional du Luberonpar Luberon Nature
Fermé au public pour rénovation depuis 2022, le Château de l’environnement est géré par le Parc Naturel Régional du Luberon (PNRL). Avec un projet contesté, opaque et flou pour le grand public, le PNRL a déjà collecté plusieurs millions d’euros de fonds publics, s’est endetté pour 30 ans et a délégué sa gestion de mécénat à une société privée.
Dédié jusqu’en 2022 à l’accueil des groupes scolaires, le Château de l’environnement fait maintenant l’objet d’un vaste projet de restauration de la part du PNRL. Les grandes lignes de ce projet ont été présentées lors d’une réunion publique en février 2023. Il a fait l’unanimité contre lui des riverains et des associations de défense de l’environnement.
Baptisé pompeusement « centre d’interprétation des patrimoines naturels et culturels », il comportait notamment des jardins à la française, une offre de restauration et d’hébergement, un musée, l’accueil d’événements, un parcours d’accrobranche en plus de l’accueil des scolaires. Il prévoyait 45 000 visiteurs à l’année, une aberration dans cet environnement fragile où l’approvisionnement en eau est menacé.
Il supposait l’agrandissement de la voirie et la création de parkings sur des prairies actuellement utilisées par l’un des derniers bergers.
Sa réouverture, initialement prévue pour 2025 est reportée à 2027.
Des travaux ont démarré fin février pour l’accès au château et pour la construction d’une nouvelle salle extérieure dont il n’avait pas été question lors de la présentation. Le projet initial aurait-il été remanié ? Il semble pourtant que non, en dépit des critiques dont il a fait l’objet. Il est vrai que ni le public ni Luberon Nature, malgré ses nombreuses demandes, n’ont pu en obtenir le détail. Aucune demande d’autorisation d’urbanisme ou administrative n’a été déposée.
Il existe apparemment un plan de financement global des travaux faisant l’objet de multiples révisions, mais pas de programme architectural, pas de budget ni de comptes précis, pas de compte d’exploitation prévisionnel ni de business plan.
Pour autant en quatre ans sept délibérations successives du syndicat mixte du PNRL ont voté des demandes de financement pour de nouveaux objectifs ou de nouveaux aspects du projet. L’assiette globale des dépenses a été réévaluée en février 2024 à près de 10 000 000 € HT, toujours sans la moindre justification.
Ces dépenses sont financées par diverses subventions des acteurs publics, par emprunt et par mécénat. La région et l’État interviennent dans ce montage pour 65%, le département et l’Europe pour 15%.
En 2024, le PNRL a validé un prêt d’environ 2 000 000 € avec un plan de financement fantaisiste et sans budget prévisionnel d’exploitation. Les premières échéances sont prévues en 2025 – alors que le château sera encore fermé.
Il a aussi été signé avec la société Blooming un contrat par lequel il lui délègue la création, la collecte et la gestion d’un fonds de dotation privé alors qu’il aurait dû solliciter le Fonds de dotation « Parcs naturels régionaux de France ».
Par cette délégation, il ne respecte pas les obligations imposées par la Charte éthique du mécénat et du parrainage d’entreprise dans les PNR. Le protocole d’accord ne prévoit même pas les contreparties dont bénéficiera la société Blooming. D’après le code des impôts, la gestion d’un fonds de dotation doit d’ailleurs être désintéressée.
Pourquoi, dans ces conditions, l’État, la Région, le Département continuent-ils à subventionner le PNRL ? L’association Luberon Nature a soumis à la Chambre Régionale de la Cour des comptes un signalement pour « mauvaise utilisation d’aides publiques et privées. » Sera-t-il suffisant pour mettre un terme à cette gabegie ?
Claudie Renard, Administratrice (Luberon Nature)
- L’hiver est-il la bonne saison pour nettoyer les bassins ?par Luberon Nature
Est-ce ce que l’hiver est une saison pendant laquelle on peut nettoyer les bassins sans nuire aux animaux – aux amphibiens – qui dépendent de l’eau pour une partie de leur cycle de vie ? » Vous pouvez vous référer à deux articles parus dans nos Brèves Nouvelles pour vous rappeler que les Salamandres Tachetées donnent naissance à leurs larves et que les Tritons Palmées déposent leurs œufs dans l’eau des bassins ou des mares, et qu’il faut un certain temps pour que la métamorphose se réalise et que les nouveau-nés sortent de l’eau pour commencer leur vie terrestre. On entend dire que c’est en hiver que ces amphibiens ne sont plus dans l’eau, et que l’on peut nettoyer les bassins.
Trois larves de Salamandre Tachetée dans un bassin le 2 décembre 2018 (photo ©Crystal Woodward) Deux Tritons Palmés dans un bassin le 8 février 2017 (photo ©Crystal Woodward) La petite taille des larves peut être appréciée par rapport aux feuilles de chênes parmi lesquelles elles sont posées.
Pourtant, ces cycles de vie n’obéissent pas toujours à un calendrier strict, et il peut y avoir des variations : par exemple (voir photos), on peut trouver des larves de salamandre dans un bassin en décembre :
Ou encore, il peut y avoir des Tritons Palmés adultes qui, quittant leur milieu terrestre, sont revenus à l’eau avant le printemps, pour faire leurs parades nuptiales plus tôt que ce que l’on aurait pu croire.
Leur camouflage parmi les feuilles les rend difficile à discerner. Nous vous encourageons donc à regarder soigneusement avant de procéder au nettoyage d’un bassin ou d’une mare. Si vous voyez de tels petits animaux, le mieux serait d’attendre. Car si vous commencez à enlever des feuilles au fond ou les herbes aquatiques, il peut y avoir ces animaux dans ces herbes et si vous les sortez de l’eau, ils vont mourir.
En général, même si vous ne voyez pas ces animaux, sachant qu’il peut y en avoir, vous pourriez nettoyer seulement une partie du bassin, et attendre une saison plus tard pour nettoyer l’autre partie. Ainsi, vous n’enlevez jamais toutes les herbes aquatiques ou la végétation du fond, qui servent de cachette et qui hébergent des micro-organismes qui servent de nourriture pour ces animaux. Aussi, évitez de racler le fond du bassin.
Effectivement, il est important de ne pas laisser la végétation aquatique devenir trop dense non plus, car cela entraverait la mobilité et les déplacements de ces amphibiens dans leur chasse aux petits invertébrés à manger ou, comme pour les tritons, pour leurs parades nuptiales.
Lors du nettoyage autour du bassin, évitez de laisser tomber des branches ou des ronces coupées dans le bassin, car cela empêcherait la lumière de pénétrer bien dans l’eau, et pourrait obstruer et même blesser ces petits animaux.
Rappelons-nous qu’il faudrait respecter un périmètre autour du bassin. Comme cité dans le N° 136 de Brèves Nouvelles (J. Brichard, Parc du Luberon, 9 mai 2019).
“Le milieu terrestre est important à prendre en compte dans un rayon minimum de 300 à 500 mètres en conservant une diversité de milieux offrant des zones de chasse et d’hibernation (bois, muret, friche, …)”
Puissions-nous être consciencieux de la protection de ces habitats, dans l’eau des zones humides, bassins, mares, et autour2.
Crystal Woodward
- La salamandre tachetée, Nov. 2018, Brèves Nouvelles N° 133 ; et, Biodiversité et tritons palmés dans le Luberon, Déc. 2020, Brèves Nouvelles N°136
- A lire aussi, utile pour comprendre l’entretien des points d’eau, Inventaire des zones humides ponctuelles et des amphibiens en Isère Rhodanienne , Association Nature Vivante 2012, https://nature-vivante.fr/inventaire-des-mares-comme-zone-de-reproduction-des-amphibiens-en-isere-rhodanienne-2012/
- Luberon Nature Info – Février 2025par Luberon Nature
Luberon Nature Info – Février 2025
- » Luberon-Nature-Info-Février-2025.pdf
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La lettre d'information de Luberon Nature Télécharger - Brèves Nouvelles – N°139 – Janvier 2025par Luberon Nature
Brèves Nouvelles 139 - Janvier 2025
- » BN-139-Janvier-2025.pdf
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Télécharger - Décès de notre Président et Ami Robert BOZZApar Luberon Nature
Chers Adhérents et Amis,
Le Conseil d’Administration de notre association a la profonde tristesse de vous faire part du décès de notre Président et Ami Robert BOZZA survenu le 17 janvier.
Nous aurons bien sûr l’occasion de revenir très prochainement sur le rôle éminent joué par Robert BOZZA à la tête de LUBERON NATURE et de souligner combien, par ses compétences et son dévouement, il a contribué au développement, à la prospérité et l’efficacité de notre association.
Ses obsèques seront célébrées à OPPEDE le lundi 27 janvier à 10h30.
Plus que jamais dans ces moments douloureux nous avons besoin de vous.
Croyez, chers adhérents et amis, à nos sentiments dévoués.
- Vision 2023-2026 Luberon Naturepar Luberon Nature
L’association Luberon Nature, forte de ses 57 ans d’existence, de ses très nombreux adhérents, de ses agréments au titre de la protection de l’environnement renouvelés régulièrement depuis 1979 poursuit un formidable effort au service du territoire du Luberon.
De nouveaux défis sont apparus ces dernières années, pour bon nombre liés à l’évolution climatique. L’association a besoin pour cela de nouvelles forces et appelle ses adhérents à la soutenir et à l’accompagner dans ses actions en renouvelant leur adhésion et don et par une forte contribution en temps et en énergie.
En conséquence, son Conseil d’Administration présente ce qui devra guider ses actions.
Vision : 5 orientations poursuivies
- Reconnaissance des adhérents comme principale ressource de l’association et augmentation de leur nombre, particulièrement parmi les résidents locaux en activité
- Communication et promotion de Luberon Nature
- Gestion des projets en petites équipes avec des volontaires
- Anticipation / médiation et force de proposition pour les dossiers à traiter
- Développement des ressources financières de l’association
Action envers les acteurs du territoire
Les 3 années passées ont été consacrées, notamment
,au développement des relations sur le terrain avec les élus locaux et la compréhension de leurs attentes : 72 communes visitées. Cela doit se poursuivre.Pour les 3 années à venir, l’accent va être mis sur les acteurs économiques du territoire en les rencontrant comme cela a été fait avec les élus du terrain. En effet, dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), Luberon Nature souhaite mettre à contribution ces acteurs face aux enjeux du développement durable pour un territoire encore plus vivant et plus solide.
Sept axes opérationnels, conformes à ses statuts, visant à trouver un équilibre entre protection de la nature et développement des activités humaines (économiques, sociales, culturelles…), qui font vivre le territoire et sauvegardent l’environnement ainsi que la qualité de vie de ses habitants :
- Contribution à la lutte contre l’artificialisation des sols et préservation de la biodiversité avec soutien à l’agriculture respectueuse de l’environnement (par exemple, agriculture biologique et paysanne) et à l’élevage extensif et pastoral également respectueux de l’environnement et non destructeur des espaces naturels protégés,
- Lutte contre les dépôts sauvages et actions en faveur de la réduction des déchets et l’amélioration du tri,
- Sensibilisation à la pollution lumineuse,
- Veille active sur la conformité des projets photovoltaïques à notre doctrine,
- Sensibilisation des populations au risque incendie en liaison étroite avec les acteurs déjà impliqués,
- Sensibilisation à la ressource en eau du territoire et actions pour la préserver,
- Engagement pour un tourisme raisonné et écoresponsable.
Objectifs des axes Vision 2020-2023 qui restent à atteindre
- Élargir la base des adhérents pour inclure des populations actives non représentées (agriculteurs, artisans, et professions diverses, éleveurs et producteurs Bio, magasins Bio, etc.)
- S’appuyer sur la première ressource de l’association que constituent ses adhérents. Adhérents à la fois veilleurs pour capter au plus tôt les informations et ambassadeurs pour faire connaître Luberon Nature et porter sa parole dans l’ensemble de l’écosystème (populations, élus, Parc du Luberon, associations, administrations…).
- Élargir les sources d’informations pour les recueillir et les croiser le plus en amont possible.
- Privilégier ainsi l’anticipation / prévention par rapport à l’intervention en procédant du dépistage plutôt que du traitement.
- Développer la communication externe par la participation à des événements ainsi qu’à l’organisation de conférences, visites commentées, expériences communes… en propre afin de développer les adhésions, particulièrement auprès des populations actives du territoire.
- Mettre en œuvre un programme ambitieux de financement de l’association dans le cadre autorisé par les statuts de Luberon Nature.
Fonctions assurées par l’équipe du bureau assistée par des membres du CA et des adhérents actifs
Des solutions doivent être mises en place pour 5 sujets ci-dessous.
Pour mener à bien le programme fondé sur ces axes, il est fait appel non seulement aux membres du bureau, mais aussi à tous les membres du CA et aux adhérents souhaitant prendre en charge les fonctions suivantes qui pourront être complétées :
- Président*
- Secrétaire*
- Trésorier*
- Communication externe et relations avec les organismes publics et privés.
- Animation des adhérents, de la communication interne et de la veille réalisée par le réseau des adhérents.
- Gestion des équipes projet et du tableau de bord de suivi des dossiers.
- Relations avec les associations.
- Amélioration des sources de financement actuelles (adhésions, dons…) et recherche de nouvelles sources de financement.
* obligations statutaires
- Aidez-nous à sauver les terres des Hauts Banquets et porter un coup d’arrêt final à la ZAC !par Luberon Nature
La lutte contre la ZAC des Hauts Banquets bât son plein et nous sommes bien décidés à la mener jusqu’à la victoire. 46 ha d’excellentes terres agricoles irriguées et plus de 100 ha à termes de maraichages, de prairies, de friches sont à sauver. Nous le pouvons encore ! Alors que la zone est ouverte depuis 2021, 90% restent aujourd’hui vierges de béton.
Et c’est grâce à vous ! Votre soutien nous permet de mener des actions juridiques et médiatiques pour bloquer et dissuader les entreprises de s’y installer.
Aujourd’hui, nous sommes dans une ultime urgence : gagner l’appel contre la ZAC des Hauts Banquets !
7 associations environnementales (AVEC Cavaillon, AEQV Cheval Blanc, FNE Vaucluse, Luberon Nature, Foll’Avoine, Confédération Paysanne, SOS Durance Vivante) font appel du jugement du Tribunal Administratif de Nîmes et iront devant la Cours d’Appel Administrative de Toulouse pour demander l’annulation la création de la ZAC. D’autres recours permettent dans le même temps de bloquer les permis de construire (d’entrepôts de logistique essentiellement) et empêcher la destruction irréversible des terres et de notre qualité de vie à toutes et tous.
Aidez nous à mener notre appel jusqu’à la victoire et à bloquer l’installation d’entreprises jusqu’au jugement (le procès aura lieu courant 2024).
Votre soutien est indispensable : votre don nous permet de financer les honoraires de notre avocat.
Les dons sont déductibles d’impôts. Un don de 100 euros vous coute réellement 33 euros.
A l’heure du dérèglement climatique, de la canicule et des sécheresses, sauver les terres des Hauts Banquets, c’est aussi sauver notre qualité de vie à toutes et tous.
C’est aussi sauver les terres voisines promises à l’extension de la ZAC.
C’est enfin offrir un autre avenir à Cavaillon, pays du melon que le béton, le goudron et les camions.
Soutenez notre lutte pour donner une chance à un projet respectueux de l’environnement, des riverain.e.s, des habitant.e.s de voir le jour sur ces terres !
D’autres projets existent, créateurs d’emplois durables et qui s’appuient sur l’économie locale.
- La lutte en images : http://youtu.be/4TriaE2c_oE
- Nous suivre : https://www.facebook.com/groups/1848617775478919/
- Nous connaitre : www.sauvonsnosterres84.com
- Nous rejoindre : https://luberonnature.fr/
Merci !
- Destruction de terres agricoles à Cavaillonpar Luberon Naturehttps://youtu.be/4TriaE2c_oE
Parce que la préservation des sols est une nécessité absolue face aux défis climatiques, écologiques et de qualité de vie à tous, Luberon Nature fait partie des sept associations environnementales vauclusiennes qui luttent contre l’artificialisation des terres agricoles sur notre territoire.
Située en plein cœur du Parc du Luberon entre Cavaillon et Cheval Blanc, la ZAC des Hauts Banquets sort aujourd’hui de terres avec ses 46ha, 110ha à termes, sur d’excellentes terres agricoles au pied du petit Luberon. Elle accueillera en grande partie des entrepôts logistiques.
Notre territoire ne doit pas devenir une plateforme logistique. Nous soutenons une économie décarbonée respectueuse du vivant et du Luberon, en cohérence avec le Plan Climat Air Energie Territorial ainsi que le Plan Alimentaire Territorial.
- Luberon Nature Info – Juin 2023par Luberon Nature
Luberon Nature Info – Juin 2023
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La lettre d'information de Luberon Nature Télécharger - Interview de Alain Jalouxpar Luberon Nature
Comment Goult, site historique, touristique et panoramique est devenu un centre géographique et astronomique où, au mois de mai, des savants du monde entier venaient, sous son ciel pur et sans voile, étudier les étoiles.
Entrevue de Alain Jaloux (AJ) par Mechtild Rössler (MR), Goult le 8 janvier 2023C’est à l’occasion de l’exposition de cartographie, organisée à Goult, il y a vingt ans, qu’Alain et moi eurent l’opportunité de nous rencontrer….entre géographes !
MR : Peux-tu me dire comment tu es arrivé à Goult ?
AJ : Ingénieur à l’Institut Géographique National (IGN), en 1970 j’ai été affecté comme professeur à l’École Nationale des Sciences Géographiques (E.N.S.G.) dont le cursus de formation comporte un enseignement théorique à Saint Mandé et des travaux d’application sur le terrain pendant quatre mois en Provence. Tous les étés je rejoignais Goult, y ai acquis une ruine que nous avons restaurée. Puis ma carrière s’est poursuivie comme responsable de projets cartographiques à l’étranger. Goult était le point de chute des vacances et, depuis ma retraite, nous y sommes une grande partie de l’année.
MR : Pourquoi cette implantation de l’IGN à Goult ?
AJ : L’IGN a été créé le 27 juin 1940, succédant au Service Géographique de l’Armée. Dès avril 1941 un décret fixait la création de l’École Nationale des Sciences Géographiques (E.N.S.G.) pour assurer la formation des personnels : ingénieurs, techniciens, dessinateurs, photo-identificateurs. Le cursus d’enseignement comportait, outre les études théoriques, quatre mois de travaux d’application sur le terrain ; ceux-ci s’appliquant aux diverses techniques liées à la Cartographie : triangulation, nivellement, gravimétrie, géomorphologie, topographie,… et en particulier l’astronomie de position. C’était la seule solution, par observation des étoiles, de définir sa position en longitude et latitude, le point de départ pour établir un canevas préalable à tout lever cartographique. En effet le G.P.S., à l’origine exclusivement militaire, ne sera opérationnel pour usages civils qu’en 1995. C’est alors qu’en 1947 le Centre d’instruction d’astronomie s’installe à Goult, « site choisi compte tenu de la météorologie et de l’assurance de bénéficier d’un pourcentage élevé d’avoir des nuits claires, sans nuages » (Extrait du rapport de mission de l’époque). L’IGN fait l’acquisition du moulin, en haut du village, y installe une grande baraque pour les cours et calculs ainsi que cinq cabanes d’observation.
MR : Existait-il des activités autres que l’astronomie ?
AJ : Oui, car L’E.N.S.G. devait alors une grande partie de sa réputation aux travaux d’application sur le terrain pour les techniques liées à la cartographie. Très rapidement, elle devra accueillir 100 à 150 élèves et stagiaires par an. Goult, outre l’enseignement de l’astronomie, devient, dès 1948, le siège du Groupe d’Instruction de Haute Provence. Des centres sont ouverts à Roussillon, Apt, Gordes, Reillanne, Céreste, Forcalquier, Manosque. Les Provençaux, chaque année en avril, accueillent pour quatre à cinq mois les élèves et l’encadrement de l’IGN.
MR : Qui étaient tous ces élèves et stagiaires ?
AJ : A l’origine il s’agissait des personnels de l’I.G.N. auxquels simultanément se sont joints les cadres, ingénieurs et techniciens de l’information géographique d’ organismes français et de ceux de 90 pays étrangers. Au total, de 1941 à 1991, près de 5000 élèves et stagiaires, dont plus de 1500 étrangers sont venus se former ou se perfectionner dans des applications liées à la cartographie. L’I.G.N. a ainsi signé une convention de coopération, avec volet formation, avec une quinzaine de pays étrangers. Pour ce qui concernait la France les promotions se succédaient : officiers et sous-officiers du Service Géographique de l’Armée, élèves ingénieurs de l’Institut français du Pétrole, de l’École Supérieure des Géomètres et Topographes, Géographes de l’ORSTOM, Officiers Méharistes mais aussi Intervenants du Comité Antarctique des Expéditions Polaires, géophysiciens, archéologues…des gens de terrain de diverses spécialisations, opérant sous toutes les latitudes.
MR : C était donc l’I.G.N. en Luberon…?
AJ : C’est exact, d’autant plus que les services de l’I.G.N., profitaient des structures existantes pour expérimenter ou mettre au point des techniques appliquées à la géodésie, à la triangulation, au nivellement, à la topographie. Elles furent très efficaces ; même et surtout si certaines d’entre elles paraissent bien désuètes aujourd’hui, citons par exemple :
- Mesure de longues distances à l’aide du telluromètre : moulin de Goult / Pic Saint Loup, 115 km; en définissant l’influence des conditions atmosphériques.
- Chambre balistique pour photographier des satellites, type ECHO, sur fond d’étoiles en vue de liaisons intercontinentales.
- Étude opérationnelle d’instruments nouveaux tels que le statoscope pour les prises de vues aériennes, le chronographe imprimant (réception de l’heure en astronomie).
- Mise au point du nivellement barométrique.Il fallait établir le canevas altimétrique des cartes à petite échelle, 1/200 000, dont de nombreux pays allaient s’équiper (Maghreb, Sahel, ex A.E.F., A.O.F., Madagascar,…). Le nivellement de précision, ou nivellement direct, par portées de quelques dizaines de mètres ne pouvait être mis en œuvre que sur des zones (en priorité urbaines) limitées. Sur des milliers de kilomètres de routes et pistes, le nivellement barométrique permettait, par mesure de la pression atmosphérique, de définir l’altitude des points stationnés sans nécessité d’inter-visibilité d’une station à l’autre. L’école a pris une part active en formant les élèves aux conditions d’emploi du baromètre, obligatoires pour obtenir une précision optimale.
MR : Il devait se créer des contacts avec les habitants ?
AJ : Oui, et toujours très conviviaux. Les travaux de terrain et les conditions de vie en commun contribuaient à créer un esprit de camaraderie et d’amitié, non seulement à Goult mais aussi dans les autres centres. Les réseaux autoroutes et TGV n’étaient pas ce qu’ils sont aujourd’hui ; les week-ends se passaient sur place. Il fallait prévoir les logements car les hôtels, prix et rigidité des horaires, étaient exclus. Les gîtes étaient rares et peu équipés , puis devenus trop chers à l’époque du boom des résidences secondaires.
Il y avait alors un esprit d’entraide de la part des habitants ; de la part de l’I.G.N. qui fournissait les équipements popote, camping, tables et fauteuil de brousse, couchage – vélos et vélomoteurs pour les plus éloignés. Les garagistes locaux en assuraient l’entretien ainsi que celui des véhicules de l’administration. Il fallait également prévoir l’embauche d’aides et de « porte mire » pour les élèves. Cela permettait aux jeunes provençaux d’avoir des vacances rémunérées et de réserver la place pour l’année suivante. Le rapport de campagne de 1959 signale que le recrutement a été facilité cette année-là par l’effondrement du cours de la lavande et donc du ramassage. Le week-end était alors l’occasion de se retrouver, élèves et instructeurs, autour d’un méchoui d’un couscous ou d’un barbecue ; d’un repas afghan ou libanais !
MR : Que se passa-t-il ensuite, après ces riches années ?
AJ : D’une part, pendant cinquante ans, la formation donnée dans le cadre de l’école et la contribution de l’I.G.N. à l’instruction de personnels par transfert de technologie ont contribué à assurer l’encadrement d’Instituts géographiques et services techniques étrangers qui ont pris le relais de la formation de leur personnel. D’autre part, la fin des années de croissance économique vit la fin d’une politique généreuse en crédits au bénéfice de la coopération. Enfin, simultanément à la réduction des budgets et des aides, l’évolution des techniques a conduit à une restructuration. Ne citons que le GPS qui renvoie dans le passé l’ex « apprenti astronome » en short et basket. Voilà comment en 1990 une page de l’histoire de l’IG.N. en Provence était tournée. Le nombre des centres fut réduit à deux et le moulin rétrocédé de gré à gré à la commune de Goult.
Moulin de Jérusalem, Goult © Sylvain Goletto 2006, Wikimédia C’est alors que dans le contexte des relations privilégiées I.G.N./ Luberon, il fut envisagé la création d’un « Conservatoire National des Sciences Géographiques ». Rien n’existe en France sur ce thème et l’étude fut entreprise sous l’égide du Parc Naturel Régional du Luberon, avec la participation de la Cité des Sciences et de l’industrie, la Communauté de Communes Goult, Bonnieux, Roussillon, le 28° Groupe Géographique. Le Comité National de l’Information Géographique devait consulter une quinzaine d’organismes, liés de près ou de loin aux sciences géographiques. De nombreuses réunions de travail pendant plusieurs années, ont permis d’élaborer un projet en phase avec l’étude de faisabilité. Il ne restait qu’à définir le financement, point crucial, qui ne put être résolu compte tenu de la situation liée à la crise financière de 2008.
MR : Si je me rappelle bien, vous avez fait une exposition en 2002 ?
AJ : Oui l’objectif, dans la perspective du Conservatoire, était de sensibiliser les visiteurs touristes et habitants, au rôle de la carte : figurer le monde connu, ouvrir de nouvelles perspectives. L’intitulé choisi fut « de l’aquarelle aux pixel » faisant référence à l’aquarelle, facture des cartes anciennes, et au pixel, facture des cartes modernes et numériques. Elle retraçait l’histoire des cartes et des techniques et illustrait leurs fonctions : localiser, communiquer, naviguer, protéger, surveiller, prévoir, décider, aménager. La cartographie intègre tout ce qui contribue à l’environnement, cadre de vie et sciences de la nature.
MR : Aujourd’hui comment évoquer la fin de cette histoire ?
A J : Il est vrai que si l’I.G.N. a maintenant quitté ce coin de Provence, nombreux sont encore les habitants les plus anciens avec lesquels on peut évoquer ce demi-siècle d’activité. Il y a aussi les cadres des services géo étrangers avec lesquels des liens sont maintenus grâce à l’association des anciens élèves. Il y eut même des mariages entre astronomes et Provençales !
A Goult, en particulier, la visite du moulin donne aux visiteurs le détail de ce que fut son activité Géographique ; en arrivant en haut du village on traverse l’esplanade, officiellement appelée « Aire des Astronomes » et où a été installée une sculpture sur bois figurant une lunette astronomique réalisée par un artiste goultois dit «Coucoune».
Autre souvenir, Mr. Degrand, patron de l’ex-garage de Goult, poète à ses heures a laissé quelques vers :
« Goult, site historique, touristique et panoramique
est devenu un centre géographique et astronomique
au mois de mai, des savants du monde entier
viennent sous son ciel pur et sans voile, étudier les étoiles »
Reste à souhaiter que le projet de création du Conservatoire perpétue le destin peu banal et certainement unique pour un moulin à vent, au service de la cartographie pendant près d’un demi-siècle.
MR : Merci beaucoup, Alain, pour ce récit formidable d’une autre époque de collaboration internationale dans le Luberon !
Alain Jaloux (*1934) géographe de formation et ingénieur des travaux géographiques et cartographiques de l’Etat à l’Institut Géographique National. Il était aussi président de l’Association patrimoine de Goult et habite à Goult et Paris.
Mechtild Rössler (*1959) est géographe de formation et spécialiste de paysage culturel, ancienne Directrice du Centre du patrimoine mondial de l’UNESCO (2015-2021) et chercheur associé du CNRS (UMR 8504 Géographie-cités). Elle habite entre Goult, Paris et Freiburg.